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« Un livre inclassable »


 
De la paille au sol, un chien déambulant entre les tables, des tabourets taillés dans des souches d’arbres… C’est dans le cadre atypique du bar de la Cabane du Darou que s’est déroulée la présentation du livre de Luc Bronner, Chaudun, la montagne blessée. Son éditrice laisse transparaître une personne d’apparence timide. «Je vais avoir la lourde charge de le faire parler», affirme-t-elle en rigolant. Luc Bronner tente aussi de détendre l’atmosphère : «Il paraît que c’est le café le plus sympa de Saint-Dié».

Le livre présenté contraste fortement avec le précédent sur les banlieues. Il y décrit le parcours d’une montagne abîmée par l’homme. Chaudun était un petit village situé dans les Hautes-Alpes, aujourd’hui disparu. Mélange de poésie, de littérature, d’histoire… le destin de ce lieu est retracé d’une manière inclassable. «J’ai relu mon texte cinq ou six fois à voix haute et ceci afin de le transformer le plus possible en conte». Un conte d’une réalité frappante avec des listes d’enfants morts. L’éloignement par rapport aux grandes villes, l’accès difficile et les mauvaises conditions sanitaires sont la cause directe de ces drames.

Luc Bronner s’est imprégné et consacré aux archives de l’époque au point de connaître les habitants par cœur. Par la suite, il les a transformés en personnages du fait du genre particulier adopté. «Je me suis autorisé quelque chose qu’un journaliste ne s’autorise pas».

Le livre offre une excellente leçon de morale. Les habitants, ne pouvant plus subvenir à leurs besoins, ont vendu le village de Chaudun à l’Etat en 1895. Une initiative d’envergure y a été menée. Quatre millions d’arbres plantés en 40 ans. Cela aura permis d’éviter les ruissellements qui avaient lieu à cause de l’exploitation intensive de la nature par l’homme. Le sort de ce village souligne la présence passagère de l’homme sur cette planète et la puissance de la nature à reprendre ses droits. Face à la crise climatique actuelle, les démocraties sont-elles suffisamment armées pour changer radicalement nos comportements avant que notre espèce ne s’éteigne par sa propre faute ?