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Vers la fin de l’Europe ?



Des historiens dans un festival de géographie. Cette idée paraît paradoxale mais c’est le défi qu’ont dû relever Luuk Van Middelaar et Sylvain Kahn. Animée par Christophe de Voogd, la conférence traite d’une problématique qui germe chez les Européens : l’avenir de l’Europe.

Historiens et visionnaires. C’est le rôle de Sylvain Kahn et Luuk Van Middelaar en ce dernier jour du FIG. En jouant les Cassandre, les deux hommes s’attaquent à la thématique du futur de l’Europe, s’il est encore du moins possible. Commençons par le commencement : les enseignements à tirer de la pandémie. Sylvain Kahn est le premier à se lancer et note un fort paradoxe de la stratégie européenne. Si l’Europe a relevé le défi de mettre en place une politique rapide, des insuffisances ont aussi été révélées au grand jour : «Dans le domaine du développement, Sanofi n’a pas réussi a développer son propre vaccin», souligne l’intellectuel.

Une vision que partage son confrère Luuk Van Middelaar : «Il y a eu un cri de détresse vis-à-vis de tous les Européens et cet appel était trop fort pour qu’on puisse le négliger».

Passant la pandémie actuelle, les deux hommes accompagnés de Christophe de Voogd s’attaquent à une question des plus épineuse : «Est-ce qu’il y aura encore une Europe en 2050 ? »

Question délicate qui nécessite une réponse prudente. D’autant plus que plusieurs scénarios sont esquissés par les deux intervenants. «Moi, j’y crois. En tant qu’historien, je vois qu’il y a des volontés de vivre ensemble au-delà du Rhin», affirme Luuk Van Middelaar. Mais c’est avec nuance qu’il poursuit, n’imaginant que difficilement la Hongrie faire encore partie des «États-Unis d’Europe». Il est vrai que le pays de Viktor Orban fait souvent la Une de l’actualité pour ses politiques très controversées. Des valeurs qui ne feraient plus écho à celles de l’Union européenne.

La vassalisation de l’Union européenne est également un sujet qui a été ouvert durant cette conférence. C’est bien les ombres des États-Unis et de la Chine qui pourraient faire trembler l’hégémonie des Européens à l’avenir. Néanmoins, Sylvain Kahn tente d’aborder cette possibilité par un angle nouveau. Ce n’est pas une vassalisation qui attend les Européens, «si nous arrivons à tirer les épingles du jeu». Terre de richesses et toujours aussi attractive, l’Europe pourrait constituer la pierre angulaire d’un monde multipolaire selon le chercheur.

Ainsi, au coeur d’un monde secoué par une pandémie, «l’objet politique non identifié» de Jacques Delors n’est pas encore prêt à tirer sa révérence.