Quand Staline a bu la mer : le mariage du burlesque et de l’histoire


Fabien Vinçon, journaliste pour Arte, est fasciné par le projet fou de Staline d’assèchement de la mer d’Aral. Il décide d’en faire une fable absurde, criante de vérité et moqueuse d’une URSS déchue..

En haut de la Tour de la Liberté, dimanche matin, l’auteur Etienne Augris félicite les plus matinaux du FIG d’être venus jusqu’ici. Après cela, Fabien Vinçon explique la raison du choix du sujet : “En 1997, je suis journaliste à RTL et je couvre le Rallye Paris-Samarkande-Moscou. A chaque nouveau lieu, je devais faire une capsule sonore. Un jour, j’arrive dans le port d’Aralsk, au Kazakhstan, et je vois un pêcheur avec des filets devant une mer vidée. Étonné, je lui demande ce qu’il fait et il me répond : “Elle est à 50 km, j’ai deux jours de tracteurs avant de l’atteindre”.”

“Saignée”, comme il aime à dire, par les Soviétiques, la mer d’Aral était au service de l’URSS dans le grand programme de transformation de la nature. Une irrigation massive puisqu’elle servait à faire pousser du coton et du riz, gros demandeurs d’eau, en plein milieu du désert. Pour avoir la meilleure retranscription dans son roman, il décide de ne pas retourner sur place pour “se souvenir de l’émotion du voyage. Et ne vous en faites pas, j’ai lu pendant 20 ans des traités d’hydrologie, je ne suis pas non informé !” s’amuse-t-il.

Etienne Augris le questionne sur le défi que représente l’intégration de Staline dans le roman : “J’avais cette peur de l’humaniser en me mettant à sa place, même en ayant lu tant de dossiers sur lui. Je me suis lancé dans l’idée du burlesque, de la fable, pour le dessiner, comme dans Le Dictateur, de Charlie Chaplin. Le livre s’ouvre sur Staline bousculé par le vent, tombant de son lit. En colère contre le vent, on lui apprend qu’il vient d’Aral et ainsi commence son projet, dans le roman du moins”, précise le journaliste.

Léonid est le protagoniste, un pur homo sovieticus, élevé par la mère patrie : “Au début, on le pense fait de granit mais, petit à petit, il se découvre et se rend compte de la réalité absurde de son univers. Les locaux sur place vont lui permettre de rêver et de douter”, clôt le romancier.

 

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